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Le cannabis au Luxembourg : entre culture domestique, marché noir et vulnérabilité des adolescents

Dernière mise à jour
05.12.25
Cannabis flowers in Luxembourg

Diyahna Lewis, Unsplash

En juillet 2023, le Luxembourg a créé un précédent en autorisant officiellement les adultes à cultiver jusqu'à quatre plants de cannabis chez eux. L'objectif n'était pas l'autorisation totale mais la dépénalisation : les autorités voulaient affaiblir le marché noir et décharger les forces de l'ordre de la charge pénale. Deux ans plus tard, la situation est plus compliquée que prévu : la police, le ministère de la justice et les services d'aide enregistrent des effets secondaires inattendus, notamment chez les adolescents.

Selon la loi, un résident adulte peut cultiver du cannabis chez lui, mais uniquement à partir de graines, uniquement pour lui-même et uniquement dans les limites de son domicile. La vente, l'achat ou même le don de cannabis à une autre personne reste un délit. La police insiste sur le fait que même si un invité consomme le cannabis cultivé chez vous lors d'une fête, il s'agit d'un délit.

En outre, la conduite après consommation de cannabis reste dans la zone de tolérance zéro. La substance psychoactive THC (tétrahydrocannabinol) peut rester dans le corps jusqu'à 3-4 semaines, et sa présence dans le sang après un accident de la route peut entraîner un retrait de permis - même si le conducteur n'était pas en état d'ébriété au moment de l'accident.

Dans la pratique, la loi est à peine contrôlée : il n'y a pas de registre, pas de contrôle. La police admet qu'elle ne dispose d'aucune donnée sur le nombre de personnes qui cultivent des plantes, sur le respect de la réglementation et sur les personnes qui consomment réellement du cannabis. Avant la réforme, les plaintes des voisins concernant l'odeur étaient plus fréquentes. Aujourd'hui, les infractions sont plus susceptibles d'être découvertes par hasard, lors d'une enquête sur d'autres affaires.

Malgré la rhétorique politique, le marché noir du cannabis au Luxembourg n'a pas disparu. Comme le constate Steve Goedert, chef de la cellule anti-drogue du Grand-Duché, "nous voyons toujours les mêmes dealers dans les rues". De plus, un nouveau type de revendeur "à domicile" est apparu : selon Impuls, les jeunes apportent de plus en plus souvent du cannabis à l'école depuis leur domicile (à partir de buissons cultivés par leurs parents) et le vendent à leurs camarades de classe.

Ainsi, une loi conçue pour réduire les risques a permis aux enfants d'accéder plus facilement à la drogue, souvent à l'insu de leurs parents.

Selon le rapport national sur les drogues 2025, 70,4 % des personnes interrogées en 2024 ont admis avoir consommé du cannabis au cours de l'année écoulée, et près de 60 % au cours du mois précédent. Parmi les 15-18 ans, 15 % ont déclaré avoir consommé récemment. Sur la base des analyses des eaux usées, le Luxembourg s'est classé 5e sur 17 pays européens en termes de consommation.

Paradoxalement, les demandes d'aide sont moins nombreuses. Impuls enregistre une baisse du nombre d'adolescents orientés par les parents et les éducateurs. Selon Nora Vitali, chercheuse à l'Université du Luxembourg, il s'agit là d'un signe inquiétant : la société est devenue moins sensible aux risques. "Les gens perçoivent le cannabis comme quelque chose d'inoffensif puisqu'il est légal", explique-t-elle. - Mais il reste totalement illégal pour les mineurs et ses effets sur le cerveau en développement sont comparables à ceux de l'alcool.

La teneur en THC des envois saisis a augmenté de manière spectaculaire : en 2024, elle atteignait 16,4 % dans le cannabis, 33,5 % dans la résine et jusqu'à 88,7 % dans l'huile. Pour les jeunes consommateurs, cela peut avoir des conséquences imprévisibles, surtout en l'absence de contrôle du dosage et de la qualité à la maison.

La police reconnaît qu'en termes de réaffectation des ressources, les changements ont été bénéfiques : les agents peuvent désormais délivrer des amendes sur place sans ouvrir de dossier pénal. A titre d'exemple :

  • pour la consommation dans un lieu public : 55 € - 48 €.
  • pour la possession de moins de 3 grammes : 278 € (en 2024) et 313 € (en 2025)

Au total, l'État a reçu environ 100 000 euros d'amendes en deux ans et le nombre d'affaires portées devant les tribunaux a diminué de 700. Toutefois, le trafic, la consommation d'alcool par des mineurs et la conduite en état d'ébriété restent des infractions pénales.

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Dernière mise à jour
05.12.25

Les sources des photos utilisées: Diyahna Lewis, Unsplash

Auteurs: Alex Mort