Un air plus pur, des températures plus élevées : pourquoi l'Europe surchauffe-t-elle malgré les luttes environnementales ?

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L'Europe entre dans une nouvelle ère climatique : 2024 sera l'année la plus chaude jamais enregistrée. Selon un rapport conjoint du Copernicus Climate Change Service et de l'Organisation météorologique mondiale (OMM), les températures sur le continent ont battu tous les records. Dans une interview accordée à RTL Radio, le climatologue luxembourgeois Andrew Ferrone qualifie ce phénomène alarmant de "paradoxe de la pureté".
Selon lui, malgré les avantages évidents pour la santé, l'amélioration de la qualité de l'air a joué un rôle inattendu : la réduction de la concentration des particules d'aérosols qui réfléchissent la chaleur solaire a entraîné une accélération du réchauffement de l'atmosphère. L'Europe du Sud est particulièrement vulnérable, où les vagues de chaleur et les sécheresses s'intensifient, explique l'expert, qui représente le Luxembourg au sein du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC).
M. Ferrone souligne que l'Europe doit se préparer non seulement à des vagues de chaleur, mais aussi à des contrastes climatiques marqués - précipitations extrêmes et sécheresses prolongées en même temps. Cela nécessite une approche globale qui inclut à la fois la réduction des émissions et l'adaptation aux changements qui sont d'ores et déjà inévitables.
Il nous rappelle que l'objectif de limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C n'est possible que si la neutralité carbone est atteinte d'ici à 2050 - et que cela devrait être une priorité pour tous les secteurs de la société, des particuliers aux grandes entreprises.
L'adaptation est en marche : selon M. Ferrone, 51 % des villes européennes disposent d'un plan climatique, soit près du double du chiffre de 2015. Toutefois, le rythme de mise en œuvre varie considérablement.
Les plans comprennent des mesures immédiates, telles que des recommandations pour se protéger de la chaleur - rester à l'extérieur à midi, boire plus d'eau - et des solutions d'infrastructure à long terme : verdir les villes, lutter contre l'effet d'îlot de chaleur, améliorer le drainage et stocker le carbone dans la végétation.
M. Ferrone cite en particulier Paris, Milan et les municipalités néerlandaises, où une approche concurrentielle est en place : chaque année, les villes rivalisent pour augmenter la proportion d'espaces verts.
Au Grand-Duché, la première phase de la mise à jour de la stratégie nationale d'adaptation au climat a été finalisée au début de l'année 2025. Une consultation publique est désormais organisée, au cours de laquelle chaque habitant peut faire des suggestions - en ligne ou en personne lors de réunions régionales. Selon M. Ferrone, il ne s'agit pas d'une simple formalité : les opinions des citoyens influencent la mise en œuvre pratique.
La nouvelle stratégie tient compte des différences régionales, qu'il s'agisse des risques de chaleur urbaine au Luxembourg ou des risques agricoles et naturels dans le nord du pays. Le Corps des sapeurs-pompiers et des sauveteurs (CGDIS), qui intègre les connaissances locales dans le système d'intervention d'urgence, participe également à l'élaboration de la stratégie.